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Monto dé Patso dirige le Temple de la Paix Infinie (templo dé la Senfina Patso) et pratique la Voie du Zen depuis 1978 ; tout d’abord via son enseignant de Hatha Yoga, puis en 1983 sous la direction du moine zen soto Kaïsen.
Il reçut la certification de ses expériences et de leurs applications au quotidien en 1991. En 1993, il fonde le zen vékidjo qui a une particularité de formes (enseignement dépouillé basé sur l’expérience directe et en lien avec le quotidien de notre société). En 2010, il crée le Fonds ETRE Occident-Orient pour construire la future Université ETRE Occident-Orient.
Lors du gala d’officialisation du Fonds International pour la Préservation des Arts Martiaux, assis dans la dynamique de la position de l’Eveil 1, tourné vers un mur, dos à la tribune et au public. La situation illustrait l’importance de la méthode fondamentale du Bouddhisme Zen dans l’ « univers » des Bûdô (arts « martiaux » du japonais « Bu » : attraper la lancer ou déposer les armes et « Dô » : voie initiatique).
« L’immuabilité ».
Etymologiquement, de l’ancien français muable « qui bouge », donc ce qui est immuable ne bouge pas, ne varie pas, est constant voir permanent.
Sujet donc paradoxal par excellence, que l’on se place au niveau sensitif phénoménal d’impermanence, d’interdépendance et de transferts incessants d’informations entre les phénomènes ; que l’on se place du point de vue de la vacuité, plus encore de celui de l’expérience mystique puis de tout cet ensemble actualisé dans la vie quotidienne…
Le premier niveau de « lecture » fait appel à l’observation, l’analyse et la déduction. Les trois autres appartiennent directement à l’empirisme, ou pourrait être théorisés par les physiciens et notamment quantiques.
L’état sensitif et de consciences du moine zen va utiliser l’abord empirique pour communiquer sur le sujet de l’immuabilité. Auparavant, il est indispensable que ces propos ne sombrent pas dans anthropocentrisme. Un homo sapiens n’étant qu’un des phénomènes en perpétuel changement (comme les autres phénomènes), il est nécessaire de garder en mémoire tout au long de cet exposé (et peut-être après si avant ce n’était pas déjà le cas) qu’il ne faille pas prendre ce qu’un homo sapiens expose comme une vérité absolue, cosmique et universelle ; l’exposé n’est que subjectif… puisqu’il est empirique.
Traitant de l’immuabilité de l’ « esprit », il est important de le resituer. Ce dernier étant l’ensemble des fonctions cognitives, psychologiques, intuitives et d’autres au sujet desquelles nous tenterons de réfléchir (vous et « moi ») pour avoir l’esprit clair et cheminer ensemble.
A partir de quel(s) « niveaux » l’état sensitif et de consciences du moine zen aborde le sujet ?
Eliminons ce qui est hors sujet :
Le savoir soit, ici, l’acquis de concepts intellectuels, la notion de discernement ou de réflexion,
L’avoir soit le gain « définitif » d’une fonction, d’informations, ou de biens matériels.
Il nous reste « Etre ».
« Etre » est l’état (pardon pour le pléonasme) issu des expériences, des expérimentations ou des épreuves, ici, de la Voie du Zen. Ainsi, les productions mentales, émotionnelles, les perceptions et les sensations sont « vues » comme des phénomènes intrinsèques à la personne dans chaque instant passé. Qu’est-ce qui les « voit » ?
Une conscience observante, lucide sur les principes de fonctionnement (causes et conséquences inactivées, potentielles ou en action).
Cette conscience observante est également conscience incarnée dans toute la personne ; de sorte que lorsqu’elle prononce le mot « moi », le pronom « je » et toutes leurs déclinaisons, ce sera de l’ensemble de son Etre qu’elle le définira. Notons les différences essentielles d’avec les « moi » culturel, spirituel, social, familial, individuel, etc. ainsi, cette conscience observante l’est au coeur de l’être et l’englobe tout à la fois.
De ce point de vue, nous parlerons non pas d’immuabilité mais d’équanimité. Ce mot signifie « égalité d’humeur, sérénité ». L’équanimité n’est pas ici une disposition d’esprit mais le fruit naturel de l’état sensitif et de consciences du moine zen. Autrement dit, c’est une propriété dissimulée en chaque personne et qu’il suffit de cultiver pour en déguster le fruit… (et pas seulement pour « soi »…). Le moine zen est un cultivateur, donc, un terrien pragmatique.
Immuabilité et équanimité.
Propriété de ce qui est immuable ou de ce qui est serein ?
Une première phase temporelle et qualitative de cette « mise en culture » engendre la lucidité sur les phénomènes, le principe de leurs causes, une partie de leurs incidences, leurs interdépendances et leur impermanence.
Le fruit apparaît quelques fois et l’esprit équanime s’élève pour s’incarner. Puis il disparaît (fatigue, agitation, manifestation des « moi », ignorance des autres phases de l’évolution, etc.).
En se recentrant, se reverticalisant et réveillant sa bioconscience4, le « moi » de l’être revient au devant avec sa compagne l’équanimité.
Puis, une seconde phase apparaît par la répétition des expérimentations et des expériences : celle de l’équanimité plus fréquente. La dimension du « moi » issu de l’être bio conscient, entre terre et ciel, partie du reste de la Nature, car en interdépendance consciente, croît5. Etat qui s’appui principalement sur cette forme d’être décrite et sur ses autres capacités (savoirs, avoirs) afin d’utiliser ces dernières comme servantes de l’état.
Reste que cet état dépend de la temporalité et de la « croyance » en lui-même, ce qui pourrait donner naissance à une sorte de « sur-moi », au sujet duquel il serait bien nécessaire d’être attentif… Alors la sincérité et la naturelle humilité dégagées par cet état engendrent la confiance dans le Vivant et plus encore « l’abandon » de cet état. C’est ainsi que la fine fleur de l’âme, de cette conscience sans conscience, « vit » la vacuité, puis la réalisation mystique du sans-temps ou de l’infini temporel regroupant les phases du temps (des temps ?) et de l’espace infini, délicatement lumineux de la conscience cosmique (pour utiliser une expression…).
Autrement décrit, l’expérience directe de la non-substance de phénomène, du « moi » et des « mois » décrits plus en avant. Là où l’immuabilité règne…
Illusion homosapiensièque ? Réalité ?
Le quotidien réapparaît, partout où nous sommes, éclairé par les expériences. Alors les traces de l’immuable renforcent l’équanimité, c’est la vie du moine zen : « une bougie allumée, aucune ombre au zénith ».
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1) Zazen en Japonais, Ch’an en Chinois, Dhyâna en Sanscrit, posture du Bouddha, position assise du dieu Gaulois ou des Mayas, voir : www.zenvekidjo.com
2) Ce qui est basé sur le vécu par l’expérimentation ou l’expérience.
3) Fonctions supérieures cérébrales.
4) Ensemble des perceptions, sensations, du schéma corporel, de la force de gravité, du centre de gravité et d’énergie (hara ou kikai tandem), du souffle, de la conscience d’être tant dans l’immobilité que dans l’action, dans l’interdépendance et au sein de l’impermanence, lucidité des fonctionnements phénoménaux.
5) En croissance… pas en croyance.
6) s’en remettre, se confier.